Le défi de la modération Février sans alcool

Dans mes carnets de note sur la pandémie, je tombe sur des pages éclaboussées de soleil, des extraits digne d’un “je-vous-salut-marie-pleine-de-grâce”. Mais il y a aussi des pages vérités, remplies de questions. Je réfléchis beaucoup sur un sujet délicat: la vulnérabilité. Comment gérer l’anxiété? Vivre de manière équilibrée?

Yoga? Méditation? Demi-marathon? C’est champion. On peut aussi se calmer en buvant une ou deux coupes de vin. Et parfois trois. Heureuse et chaudaille. Boire, c’est d’abord et avant tout une activité sociale, pour festoyer, mais du jour au lendemain, c’est devenu un piège potentiel pour animal solitaire. Oser en parler, c’est majeur parce que ça en dit long sur nos failles. La bougie d’allumage pour initier la conversation chez-nous, c’est souvent le défi du mois sans alcool. J'ai tenté l’expérience à différents moments, en octobre comme en février. Sobriété “all in” ou Modération bienveillante?

Nous sommes le 29 janvier et je m’apprête à prendre part au défi 28 jours sans alcool. Le mot ”défi” n’est pas anodin! Combien de Mois sans alcool ai-je terminé en "pouet-pouet-pouet" ? Soyons indulgents.tes, le régime sec propose bien plus qu’un changement drastique, c’est un laboratoire pour examiner sous la loupe la valeur de l’alcool dans nos vie.

Je suis sur la ligne du départ, toujours le premier jour d'un mois choisi au hasard, pas seulement février. Règle absolue : il faut commencer sur la case numéro un du calendrier de ce mois qu'on appelle ni mai, ni avril et encore moins décembre. C'est plutôt le mois "Perfection". 

Dans 3-2-1, on va commencer. Entêtée, convaincue, allumée, dévote. 

Ce mois est spécial.

Il est parfois très bref quand on triche! court! 15 jours, vingt gros max.

Le moment le plus difficile, c’est de se passer de la coupe de vin blanc en cuisinant. C’est si délectable!

Cette fois-ci, je modifie ma stratégie. J’essaie de considérer le mois sans alcool comme une méga pause pleine conscience, 28 jours axés sur les micro-plaisirs. Vous connaissez Philippe Delerm? C’est un écrivain qui chuchote le quotidien sur des pages et des pages. Il traque les pépites dans l’ordinaire. Vit en grand les gestes, les bruits, les odeurs. Les pique-nique, marcher sous la pluie, peler une pomme. Et que dire de la première gorgée de bière?

"On savoure la couleur, faux miel, soleil froid. Par tout un rituel de sagesse et d’attente, on voudrait maîtriser le miracle qui vient à la fois de se produire et de s’en échapper."

Le mois sans alcool est un leurre s’il devient tapis de clous ou encore, un bûcher pour toutes nos délectations. Il me semble qu’on a assez donné dans le rayon des sacrifices.

Alors pourquoi bouder le doux plaisir de l’alcool pendant le pire mois de l’année? Dire non au réconfort pour affronter la froideur?

J’embarque dans ce défi pour découvrir la valeur de la sagesse. Est-ce que mon verre-de-vin-en-cuisinant écarte d’autres rituels? Je ne vais pas me priver, je vais plutôt découvrir d’autres bonheurs.

L’idée, ce n’est pas d’apprendre à retenir son souffle et sourire en même temps.

Il doit y avoir une alternative au sacro-saint “vindredi” ! L’alcool ne trône pas au sommet de la hiérarchie des plaisirs, dieux merci. Je veux partir à la découverte d’un pays exotique, direction univers des plaisirs sensoriels: boire un thé au coin du feu en pleine conscience, faire une promenade à la tombée de la nuit en s’éclairant d’une frontale, faire du pain.

La première gorgée est délicieuse. Quant aux suivantes? Marcel Proust écrivait ceci:

Je bois une seconde gorgée où je ne trouve rien de plus que dans la première, une troisième qui m'apporte un peu moins que la seconde.

Sur ce, je vous laisse. Je pars peler des pommes pour en faire une tarte odorante :-)

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